Comment mettre en place un pilotage ?

#12 Rendre visible ce qui est invisible

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C’est 2025, on vous a fait (ou on va vous faire) votre entretien annuel et on vous a mis (ou on va vous mettre) un objectif que vous n’attendiez pas : mettre en place un pilotage de processus !

Ça y est, c’est à votre tour. Vous voici avec la patate chaude 🔥

Vous prenez donc la mer avec votre harpon pour attaquer ce vieux serpent de mer dont tout le monde parle depuis des années. Certains n’ont même pas pris la peine de monter sur le bateau car ils pensaient le serpent trop terrifiant. D’autres l’ont déjà harponné mais sont tombés à l’eau, épuisés par le combat…

Maintenant, c’est à vous ! Heureusement que vous êtes fait d’un bois différent et vous êtes abonné à LA Niouzletter qu’il fallait pour vous aider dans cette mission ! Vous allez l’avoir cette sale bête et toute la production recevra son petit sac en écaille de serpent, non de non !

Après si vous avez un budget pour du conseil… Pensez à nous envoyer un mail (contact@a-qe.eu), ça vous fera un objectif de rempli sans trop vous fatiguer. 🙋

Blague à part, mettre en place un pilotage en interne ce n’est pas si simple car il faut imaginer une solution, la fabriquer, la mettre en place, convaincre tout le monde que ce que vous avez fait c’est cool et que ça va fonctionner, former les gens à ce que vous attendez d’eux ; itérer une paire de fois pour ajuster et améliorer, et enfin…. faire tenir dans la durée. Et tout ça… en parallèle de votre emploi du temps, déjà à 120% de sa capacité. Bienvenue dans le monde de l’entreprise et des objectifs annuels dont personne n’a la moindre idée de la charge de travail supplémentaire demandée.

Pourquoi piloter ? ✈️

Un processus, ce sont des trucs qui passent par des étapes pour se transformer en d’autres trucs.

Piloter, c’est s’assurer qu’aucun de ces trucs ne reste bloqué et qu’il n’y a pas d’accumulation qui se crée à une étape.

Il y a 2 raisons pour lesquelles il y a un blocage :

• Le R (responsable, celui qui doit faire l’action) ne sait pas qu’il a quelque chose à faire (ou il n’a pas envie de le faire ou ne comprend pas pourquoi il doit le faire)

• Il y a trop de choses à faire et pas assez de R

Le pilotage va être efficace pour le premier cas. Pour le second, le pilotage va pouvoir le détecter rapidement mais si aucune action spécifique n’est prise pour régler le problème, la situation va devenir très frustrante (voir la NL sur le Backlog et la charge capacité).

Le pilotage rend visible la charge invisible. Il permet aux différents intervenants de coordonner leurs actions et priorité et permet d’escalader les problèmes si besoin. Il apportera de la visibilité et de la sérénité aux acteurs. 🧘

Commençons par le début

Quel que soit le processus que vous devez piloter, un des prérequis les plus importants est de vous rencarder sur la « stratégicité » du processus (le mot n’existe pas mais c’est ce que j’ai trouvé de mieux). Est-ce que la direction du site pense que ce processus est stratégique pour l’entreprise ? Jusqu’à quel niveau les « indicateurs » (on y reviendra) de ce processus sont-ils regardés ? Qui vous a demandé ça et pourquoi ?

C’est vraiment super important car c’est grâce à ces informations que vous allez pouvoir avoir des leviers pour « inciter » les gens à respecter votre travail et « convaincre » les gens de se pointer à l’heure au point de pilotage.

C’est toujours du plus bel effet quand le directeur du site assiste religieusement à vos points de pilotage. Bizarrement, dès le deuxième coup, tout le monde est présent et a fait ses devoirs. 🥸

🌍 Mapper le processus

C’est la première étape ! Toujours.

Commencez par faire une carte, étape par étape du processus. Perso, j’adore faire ça. On découvre toujours un tas de trucs. Chaque case de votre cartographie doit contenir une étape commençant par un verbe à l’infinitif. Chaque sous processus commence par des prérequis, qui sont des livrables d’autres processus et se terminent par des livrables à leur tour.

Comme d’habitude, vous pouvez commencer tout seul mais faites challenger votre résultat par tous les intervenants.

Pendant cette réunion, profitez-en pour faire le RACI : chaque étape à un R : celui qui fait le truc et un A : celui qui doit s’assurer que le truc est bien fait (les consultés et informés vous sembleront faciles à mettre une fois les R et A déterminés).

Ça y est, vous voilà plus avancé que personne d’autre avant vous ! Vous êtes sur la bonne voie mais ce n’est pas terminé !

🎯 Déterminer ce qu’il faut piloter et quel périmètre :

Selon la complexité des tâches à accomplir, vous allez pouvoir piloter :

• Les étapes : si la tâche est bien définie et implique un seul type de personne (ex : relecture des dossiers de lots, processus de production)

• Les trucs : si les actions à faire sont variables, complexes et impliquent l’interaction de plusieurs personnes (ex : déviation, CAPA, Change Control)

Si vous êtes dans le premier cas, c’est facile. Votre point de pilotage examinera les piles (quantité de trucs) à chaque étape pour déterminer s’il faut des actions particulières.

💡Astuce : découper les piles par tranche d’âge et déterminer une taille maximale de pile pour chaque étape pour se focaliser seulement sur les étapes problématiques.

Si vous êtes dans le second cas, c’est plus compliqué. Vous allez devoir mettre un nombre de pilotage proportionnel à la quantité de trucs à examiner. En effet, pendant votre point de pilotage vous allez devoir passer une quantité de trucs cohérents avec la capacité de traitement des équipes.

Exemple :

Il y a 150 déviations actuellement ouvertes en production.

• On ne pourra pas être suffisamment efficace pendant le point de pilotage pour traiter 150 déviations

• Il va falloir découper : 2 zones de production une avec 90 déviations, une autre avec 60 déviations

• C’est toujours trop

• Le back log est de 50% de déviation en retard

• 45 déviations en cours à l’heure, 45 en backlog pour un service et 30-30 pour l’autre

➡️ C’est beaucoup mais ça peut passer, on va essayer comme ça : 2 pilotages, un dans chaque zone avec 1 session quotidienne de 15 minutes pour l’encours et 1 session tous les 2 jours pour le backlog, un peu plus longue pour la première session histoire de tout regarder puis on ne regarde plus que les engagements sur les sessions suivantes. Je reviendrai sur comment être un bon pilote dans une autre NL 😃

📊 Quels indicateurs choisir ?

Devant votre cartographie et votre RACI, vous allez vous apercevoir qu’il y a des points de passage difficiles. D’autres beaucoup moins. Parfois, toutes les étapes sont compliquées (On salue tous les chanceux qui ont tiré Change Control haha)

En général, voici ce qu’il faut regarder :

• Le nombre de trucs engagés dans votre processus

• La quantité de trucs aux étapes pertinentes

• Le temps de traversée médian des trucs

J’en ai déjà parlé dans ce numéro de la NL.

N’oubliez pas de choisir un objectif cohérent pour chacun 👍

Exemple pour les déviations :

Nombre de trucs engagés = encours de déviation = un mois de capacité de traitement. Si vous clôturez en moyenne 6 déviations par jour, l’encours sera de 6x21 jours par mois travaillés = 126 déviations en cours max.

La quantité de trucs aux étapes pertinentes = nombre en ouverture et évaluation = le plus bas possible, nombre en investigation = temps d’investigation médian x capacité de traitement idem pour en relecture/clôture.

Le temps de traversée médian = arbitrairement défini par la procédure groupe… mais en vrai, c’est surtout pour avoir un temps cohérent entre le temps d’investigation et le délai de libération. Il faut donner du temps pour investiguer mais il faut quand même se grouiller pour mettre le produit à disposition.

Conclusion

En écrivant, je me suis dit qu’il fallait un numéro spécial sur le pilotage des Change Control parce que c’est quand même une petite pépite en matière de complexité. Un peu de patience, ça va venir. ✌️

Comme j’essaye de faire tenir la NL en 1500 mots (6-7 minutes de lecture) je vais m’arrêter là. En tout cas avec ça, vous voilà déjà mieux équipez pour la bataille féroce qui vous attend.

Après ça, il reste :

• Écrire les règles

• Designer le pilotage

• Composer et former le groupe

• Mettre en place et faire le T0

• Commencer à piloter : prier les dieux du pilotage pour qu’il n’y ait pas trop de vieux crabes… ça pince, ça se cache, ça résiste…

• Ajuster pour répondre aux besoins réels

• Suivre pendant plusieurs mois et distribuer les sacs en peau de serpent

• S’enivrer du succès de votre projet et prendre une retraite bien méritée.

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